La dérive américaine
- mikecharlie48
- 7 juil.
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Depuis que le président Trump est élu et qu’il a mis en place autour de lui des hommes et des femmes tous, aveuglement jusqu’à la parodie, dévoués à sa cause, ainsi qu’à sa personne, force est de constater que le pouvoir politique américain est en train de glisser vers un régime où seule compte la force et où les règles de droit comme celle de la constitution sont bafouées et faites pour être tournées ; les exemples foisonnent et de sévères critiques, voire des humiliations, sont infligées à ceux qui émettraient des doutes sur l’action du Président que ce soit en politique intérieure ou étrangère ; dans ce dernier domaine on annonce sans vergogne, outre des impositions douanières aberrantes, des projets d’annexions territoriales et on exerce des pressions sur des états souverains, pour la gloire du président des USA « faiseur de paix » et grand défenseur des intérêts économiques de son pays…Le tout dans un concert de louanges auto-proclamées ou en provenance des thuriféraires de l’entourage, mais aussi de celles des millions d’électeurs qui vocifèrent, la bave aux lèvres, les slogans, « USA -USA !», « Maga, Maga ! » ..
Ces attitudes pourraient paraître dérisoires, voire enfantines, mais il n’en est rien et les USA sont en train de glisser vers un régime autoritaire, où le pouvoir considère que tout est permis et que seuls sont à prendre en compte la force, l’argent et la gloire d’un Président. Cette évolution vers un pouvoir qui érige le culte de la personnalité est inquiétante et pourrait s’apparenter à ce que le monde a connu dans les années trente en Europe. Ce nationalisme américain exacerbé existe déjà dans notre environnement immédiat : en Russie avec le Président Poutine, mais aussi en Turquie avec le Président Erdogan. En face de ces régimes totalitaires, les pays d’Europe ayant élu des gouvernements à tendance nationaliste, que ce soit en Hongrie en Italie ou l’Autriche, objet des plus vives critiques de la part de nos partis politiques, paraissent des havres de liberté.
Si cette dérive fascisante concernait un pays subalterne on pourrait s’en gausser, mais il s’agit des USA, pays le plus puissant du monde, qui aujourd’hui se croit autorisé à dicter aux autres nations les voies qu’elles doivent emprunter pour la paix …mais aussi pour le plus grand profit de l’Amérique éternelle !
En ce qui concerne plus particulièrement le domaine de la Défense et des forces armées, le dernier Sommet de l’OTAN a vu le Président Trump exiger des européens – en la circonstance à juste titre –un effort supplémentaire en matière de ressources consacrées à leur défense en acceptant de hausser leurs budgets à 5% de leur PIB[1].
Lors de la conférence de presse qu’il a tenue à l’issue du Sommet, le Président Trump s’est amplement félicité de la « volonté » des pays européens de hausser le niveau de leur contribution à leur défense, et il a eu tout à fait raison de s’en réjouir ; en effet, aujourd’hui pour les pays européens, les matériels de guerre dont ils sont équipés, sont à près de 70 % américains, ce qui veut dire qu’une hausse substantielle des budgets de défense profiterait amplement et quasi uniquement à l’industrie de défense américaine.
Cette dépendance aux USA des pays européens a pour conséquence immédiate, la mort de l’Europe Puissance et ainsi que celle d’une Défense Européenne indépendante ; c’est un succès pour la politique américaine qui a toujours vu d’un mauvais œil la création d’une Europe forte. Comment imaginer que l’Europe puisse avoir une politique étrangère indépendante s’appuyant sur un appareil militaire conséquent, lorsque les trois quarts de ses armées sont équipés de matériels américains soumis au bon vouloir du Congrès ou du Président, qui peut – et cela s’est produit – couper les approvisionnements si la politique suivie diffère voire est en opposition avec celle des USA.
Le général de Gaulle a fait en sorte que la France suive une politique d’indépendance nationale ; c’est ce qui a été fait et aujourd’hui notre pays dispose d’une industrie de défense puissante et nos forces sont équipées de matériels français, à part quelques exceptions. Cette logique aurait voulu qu’elle soit prolongée au niveau de l’Europe par une politique d’indépendance européenne. Chacun sait qu’il n’en a pas été ainsi par la faute des autres nations trop heureuses de se réfugier sous le parapluie US ; on aurait pu, peut-être aujourd’hui encore, espérer une évolution, mais le coup de grâce vient d’être porté, et, pour paraphraser Bossuet : l’Europe de la Défense se meurt… l’Europe de la Défense est morte …et son indépendance avec !
Général Vincent Lanata
Le 6 juillet 2025
[1] Pour ce qui concerne la France, cela reviendrait à plus que doubler les ressources prévues dans la loi de programmation, ce qui voudrait dire que l’enveloppe de la Loi de Programmation Militaire ( LPM ) qui est de près de 450 milliards devrait passer à plus de 900 milliards. On sait très bien qu’une telle augmentation ne pourrait pas intervenir sur un seul exercice de programmation, et on peut émettre les plus grands doutes sur la réussite d’une telle évolution lorsque l’on prend en compte le délabrement de nos finances publiques.